8.12.10

Aimer son enfant malgré tout.

Hier soir, à Canal Vie, a été diffusé un documentaire fort intéressant.

"Aimer son enfant malgré tout" (reprises le 9 décembre à 15h et le 12 décembre à 19h)

Un reportage de deux heures, sur des parents qui vivent au quotidien avec un enfant différent. Mais pas un enfant avec un handicap physique apparent. Un enfant avec un handicap invisible et pourtant, très envahissant. Maladie mentale, syndrôme neurologique, autisme ont été abordés.
Quelques familles, dont une maman que je côtoie sur un forum depuis plusieurs années.
Quelques exemples de courage (qui n'est pas infaillible), quelques exemples de gens qui sourient, les larmes aux yeux, la vie leur pesant parfois lourd sur les épaules.

Une maman a dit en parlant de son conjoint, qu'il était le seul à comprendre vraiment ce qu'elle vivait. C'est vous dire à quel point on se sent seuls, dans ce monde. Bien sûr, on côtoie d'autres parents d'enfants différents, mais aucun n'est confronté à NOTRE réalité. Là-dedans et à ressentir le même amour pour le même "enfant-défi", il n'y a que papa et maman.

Ma "connaissance de forum" a parlé beaucoup. Elle a lu des textes qu'elle avait écrit, avec son coeur, avec sa rage.

"Bordel, rendez-moi les enfants que j'ai mis au monde..." a-t-elle dit...

C'est le coeur noué, les yeux dans l'eau, les joues souvent mouillées et la douleur au ventre que j'ai écouté ce reportage avec mon amoureux.

Rendez-moi l'enfant que j'ai mis au monde....
Que celui qui n'y a jamais pensé me jette la première pierre. Mais c'est ça, le cri de douleur qu'on a dans le ventre, souvent, très souvent.
On a beau dire que même si on est allés visiter la Hollande plutôt que l'Italie, dans notre voyage de vie (Bienvenue en Hollande ) et que somme toute, notre voyage a du positif... Ce n'est pas ce qu'on nous avais promis au départ.

Le jour où on a déposé le bébé dans nos bras, le jour où on a posé nos yeux sur notre enfant, en souriant parce qu'il était en santé, bien vivant, tout rose et les yeux déjà curieux, on n'avait pas lu les petits caractères dans le bas du contrat.
La vie nous réservait une bien mauvaise surprise.
Et je vous le dis, en toute honnêteté, je m'en serais passée. Non, je n'échangerais pas ma fille pour RIEN au monde. Mais je reprendrais, peu importe le prix, le bébé que j'ai eu dans mes bras, la petite puce que j'ai mis au monde et qui n'avait de différent des autres que le fait qu'elle était la mienne.

Cette puce dont j'ai fait le deuil. Ce chemin de vie si prometteur qui ne sera pas le nôtre. Ce rôle de maman qui ne sera pas le mien, avec elle.

Oui, ma vie est remplie de positif. Ma vie est remplie de promesses avec elle. De belles réussites, de doux moments, de fierté et d'amour inconditionnel.
Mais ce n'est pas l'enfant que j'ai mise au monde.

On m'a volé, à grands coups de diagnostics, la petite fille sur laquelle j'ai posé mes yeux le 4 novembre 2003.
J'ai un rôle de maman, différent.

Les parents d'enfants "normaux" m'ont souvent dit "mais tu sais, tous les enfants viennent avec des défis.. on ne sait jamais dans quoi on s'embarque quand on devient parents, nos attentes ne sont pas toujours comblées". Ce à quoi j'ai envie de répondre que les défis ordinaires de l'éducation d'un enfant, peu importe sa complexité, est à chaque jour le lot de TOUS les parents. Il aurait fallu être aveugle pour ne pas réaliser qu'élever un enfant serait parfois ardu.

Mais le défi de faire de la place dans un horaire de famille pour rencontrer des spécialistes 2 et 3 fois par semaine pendant des années.
Le défi d'accepter que les façons "habituelles" de discipliner un enfant ne fonctionneront jamais sur le nôtre.
Le défi de voir notre enfant échouer à quelque chose qui devrait être si simple pour son âge et d'accepter qu'il ne sera jamais "très bon" par rapport aux autres.
Le défi de le voir pleurer parce qu'il se sent prisonnier d'un corps qui ne fonctionne pas bien et de ne rien pouvoir faire pour le consoler.
Le défi de savoir quoi répondre à son enfant qui nous demande "pourquoi moi, je suis comme ça? pourquoi moi, je ne suis pas capable?"
Le défi de voir et revoir son enfant examiné sous toutes les coutures, d'avoir une carte de chaque hôpital, d'avoir rencontré des spécialistes de douze millions d'affaires, de se faire analyser par des psys, des neuro-psys, des pédo-psys, des travailleuses sociales,etc. qui ont le nez dans notre vie familiale à chaque instant.
Le défi de devoir se rappeler chaque jour que notre job de parent, on la fait BIEN, peu importe le regard des autres. De se rappeler que notre enfant est comme il est à cause de son handicap, pas par notre faute ou par notre incompétence.
Le défi de se coucher le soir en se disant, toujours, que ce n'est pas juste.
Le défi de se dire qu'ils n'ont pas mérité ça et qu'ils n'avaient pas demandé à naître comme ça.
Le défi de voir la tristesse dans leurs yeux. La tristesse, pas celle d'un enfant de 6 ans qui a perdu son toutou ou qui s'ennuie de sa grand-maman. La tristesse, la vraie, celle profonde qu'on sait qu'il n'aurait jamais dû ressentir si petit. La tristesse de savoir que la vie ne lui a pas fait de cadeau.
Le défi de se rappeler qu'on a d'autres enfants, qu'ils se disent parfois qu'ils auraient préféré ne pas avoir de soeur ou de frère différent, parce que oui, ça prend trop de place.
Le défi de se rappeler qu'on est une maman, une femme, une blonde, une amie, une travailleuse. Pas une ergo, une ortho, une psy, une éducatrice spécialisée, une infirmière ...

Le défi d'accepter que notre enfant ne sera jamais comme les autres. Qu'il ne sera jamais ce qu'il était lorsqu'on l'a mis au monde.

13 commentaires:

  1. Je recopie mon commentaire ici...

    J'ai deux enfants comme les autres. Deux enfants, qui malgré leurs personnalités et les petits défis au quotidien q...u'ils m'apportent, ne sont pas des enfants ayant des besoins particuliers. Mais je suis psychoéducatrice, et j'ai bien souvent accueilli, écouté, supporté, guidé, aidé des parents vivant avec la réalité qui est la vôtre.

    Et même si je ne vis pas la lourdeur de votre quotidien, j'espère au moins avoir allégé quelque peu celui des parents que j'ai croisé durant ces 15 années d'intervention.

    Je tiens à vous dire que j'ai une admiration sans borne pour votre travail acharné, votre énergie, votre capacité à apprécier les petits bonheurs à leur juste valeur, vos espoirs. Et sincèrement, je vous souhaite plein de petits miracles sur votre route jalonnée de défis.

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  2. Pour moi pas de défi, seulement de l'amour!
    Le défi c'est pour lui, montrer aux autres qu'il peut faire aussi bien!
    Oui, je suis maman, psy, ergothérapeute... et docteur en plus car il est épileptique et dyspraxique! Oui, c'est l'enfant que j'ai tenu dans mes bras (ils étaient prématurés et son frère a fait de l'hydrocéphalie), j'ai du me battre pour qu'ils survivent!
    Son frère a dit qu'il serait le meilleur neuro du monde car pour lui on manque de bons neuros!
    Bon m'étant retrouvé seule avec deux bébés de quatre mois le problème de vie sociale ne se pose plus! Ca fait le vide!
    Mais ils en valent le coup, ils me le rendent bien!
    Et puis moi j'ai une maladie orpheline, évidemment de naissance, mais là elle s'est aggravée!(depuis 4 mois) Et le défi, c'est le regard des autres!

    "j'ai pour me guérir du jugement des autres toute la distance qui me sépare de moi" Antonin Artaud

    8 décembre 2010 08:22

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  3. Je sais que j'ai la même petite puce dans les bras que celle que j'ai mis au monde...
    C'est notre vie qui a changé...

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  4. Quel beau texte mon amie! Tes phrses sont justes, le ton est vrai, vrai comme ma vie à moi aussi. Je vais le mettre sur mon blogue si ça ne te dérange pas, il me parle beaucoup...

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  5. Comme c'est vrai! Tu as réussi à me faire pleurer, mais c'est tout à fait ça! encore plus dur à vivre quand même le conjoint ne comprend pas!!!
    Bises
    Sandrine

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  6. Merci Tigrou, j'adore te lire et je comprends ce que tu veux dire, moi aussi si on m'offrais une solution pour que mon petit homme trouve tous les mots qu'il a dans la tête, je la prendrais sans hésiter. On se sent seul monde, seul a partager la différence de son enfant.

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  7. Je peux comprendre ce que tu vis...même si les problèmes de Thomas ne sont pas assez intense pour parler de dyspraxie, on lui attribue tout de même un trouble d'acquisition de la coordination...je me retrouve en partie dans tes écrits et je compatie beaucoup avec ta réalité et celui de milier de parents qui comme vous, ou moi onts des enfants différents. À différents degrés certes, mais différents malgré tout. Mais ce qu'on les aimes...mais je ne peux que te seconder quand tu dis que c'est notre vie qui a changé...on s'adapte, coûte que coûte...r-v par dessus r-v....pour le bonheur de nos enfants...de nos prunelles si précieuses.
    Bibiboudin

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  8. Je n'ai pas écouté le documentaire, mais j'ai quand même pu capter une entrevue faite par le réalisateur et certains parents dans un média cette semaine.

    Si cette émission a pu sensibiliser des spectateurs à la réalité de ces familles, ça sera énorme comme impact.

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  9. Plusieurs points sont venus me rejoindre. Je suis émue. Bel écrit, rédigé avec une lucidité empreinte de tendresse. Belles pensées partagées...

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  10. Lorsque je l'ai dit, mon loulou était encore bébé! Vers deux ans comme j'insistais on me l'a dirigé vers un psy, j'ai vu une orthophoniste qui a bien décelé des problèmes mais a dit que cela ne la concernait pas, donc je me suis substituée à tout jusqu'à ce que sur un coup de colère j'exige un EEG (comme je le supposais mon loulou est épileptique et dyspraxique). Il a 11 ans et est en sixième normale (secondaire en France), on travaille ensemble le soir (je suis prof des écoles) et je lui ai acheté des outils spéciaux car comme Harry Potter il ne sait pas faire ses lacets et peine à écrire (enfin avec des stylos ergonomiques c'est mieux), il est dyspraxique visuo-spatial et par contre est un beau parleur (ça compense entre les notes écrites et orales), son jumeau est dans sa classe, donc ça m'aide pour savoir ce qu'ils doivent faire.

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  11. Merci Tigrou d'avoir accepté de publier ici ton texte...

    Il était trop beau pour ne pas le partager avec nos lecteurs. Je pense que tu as réussi à mettre en mots ce que plusieurs d'entre nous avaient dans le coeur et la tête depuis le visionnement.

    Quel défi...

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  12. Ma fille a 13 ans. Elle a un trouble de l'hémisphère droit du cerveau (aussi appelé syndrome de dysfonction non-verbal), elle est dyspraxique, a une scoliose et une cyphose dorsale, un énorme déficit d'attention, une rigidité cognitive hors du commun et est atteinte d'hypercholestérolémie familiale. Tigrou, ton texte a mis des mots sur les pensées qui m'habitent depuis toutes ces années. Merci, je sais désormais que je ne suis pas seule à trouver le défi ardu.

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  13. wowwww comme c vrai tout tout sa me rejoin tellement avec ma fille dys tda etmes deux aures tdah moi aussi je vais le mettre sur ma page je trouve que same rejoin et surtout ne faux paslacher xxx

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